La mendicité des enfants : un phénomène qui persiste bien qu’interdite
Des enfants mendiants dans une rue de Niamey/CC Ousmane Mamoudou Studio Kalangou

La mendicité des enfants : un phénomène qui persiste bien qu’interdite

La mendicité, un fléau qui malgré toutes les luttes menées continue de prendre de l’ampleur dans la société nigérienne. Celle qui est le plus à déplorer est celle des enfants et de surcroit des tout petits dont la majorité ne dépasse pas les 5 ans d’âge.

La mendicité est interdite par la loi nigérienne sauf pour trois catégories de personnes pour lesquelles elle le tolère. Il s’agit les personnes en situation d’handicap, les victimes de catastrophe et les vieillards de 60 ans à plus comme le stipule les articles 179, 180, 181 et 182 du code pénal du Niger disponible ici. Ces mesures juridiques ont été appuyées par une note de la ville de Niamey rentrée en vigueur le 1er mai 2019 faisant cas d’une relocalisation des mendiants étant autorisé à la mendicité et le refus d’octrois du permis de séjour pour ce qui refuse de s’y conformer.

Dans la compréhension de certaines personnes la mendicité est une pratique encouragée par la religion et pourtant il existe une dissociation nette. Lors d’un forum du Studio Kalangou du 21 mai 2019 Cheik Barham Aboubacar Hassoumi, prédicateur en Islam, président national du Comité de Dialogue Inter et Intra Religieux (CDIIR) a affirmé « la position de l’islam par rapport à la mendicité est très clair, il y a un Hadith du Prophète (paix et salut soit sur lui) qui disait : la main haute est meilleure que la main basse, c’est-à-dire la main qui donne est meilleure en mérite que la main qui reçoit. Donc l’Islam n’encourage pas la mendicité ». En ajoutant que dans certains cas de forces majeures, la mendicité est permise, mais juste le temps que dure le besoin, au-delà de cela elle est proscrite.

Tout comme l’Islam, le Christianisme n’encourage pas cette pratique comme l’a expliqué Barazé Djergou, révérend de l’Alliance des Missions des Eglises Evangéliques du Niger, AMEN, et trésorier du CDIIR lors du même forum du Studio Kalangou « la bible ne recommande pas qu’on fasse de la mendicité une profession, la bible aussi nous recommande de venir en aide à ceux qui sont dans le besoin ». Donc pour ces deux religions, la mendicité ne doit pas être érigée en profession.

Dans les rues de la capitale Niamey, on rencontre de plus en plus de mères mendiantes accompagnées d’enfants en bas âge et poussant également ces enfants à mendier. Force est de constater à certains endroits de la ville, toute une famille en train de mendier ou parfois uniquement des enfants pendant que les parents se reposent à l’ombre des manguiers.

Que dit la loi sur la mendicité et en particulier sur celle des enfants ?

L’article 181 du code pénal du Niger dit «(Loi n ° 63-3 du 1er février 1963). Les parents de mineurs de moins de dix-huit (18) ans se livrant habituellement à la mendicité, tous ceux qui les auront invités à mendier ou qui en tirent sciemment profit, seront punis d’un emprisonnement de six mois à un an ».

Ce n’est pas la loi uniquement qui interdit et condamne la mendicité des enfants, la religion aussi est contre cette pratique.

Malgré toutes ces restrictions, ce phénomène persiste dans la ville de Niamey où c’est des petits enfants qui parfois ne dépassent pas les 5 ans d’âge qui mendient. Tantôt comme aide mendiant, tantôt avec leurs parents qui les envoient au-devant et restant eux en retrait.

Que font les associations de protection des enfants et l’Etat face à ce fléau ?

L’Etat nigérien lutte contre la mendicité et contre celle des mineurs de moins de 18 ans en particulier. En effet lors de l’entrée en vigueur de cette note de 2019, tous les mendiants tout âge confondu ont été relocalisés sur des sites prévus pour eux et ceux qui pouvaient apprendre un métier envoyés dans des centres de formation.

Mr Zakari Ibrahim coordinateur national de la coalition des organisations nigérienne des droits de l’enfant (CONIDE) a aussi expliqué les actions qu’ils mènent dans cette lutte « nous interpellons les autorités dans un premier temps, les autorités au niveau nationale mais également communale, à travers des actions de plaidoyer que nous menons. Nous interpellons aussi les communautés pour venir en aide à cette catégorie d’enfants ».

Quel avenir pour ces enfants ?

Un enfant à droit à l’éducation, la protection et à la dignité. Dès qu’il se retrouve dans la rue à mendier il se retrouve privé de tous ces droits et est exposé à toutes sortes de vices.

« Si l’enfant n’a pas eu la chance d’évoluer dans le cadre familial, dans le milieu scolaire ou dans un cadre d’apprentissage quelconque et qu’il a passé son enfance dans la rue et bien c’est un capital humain perdu, et l’enfant va embrasser malheureusement beaucoup de mauvaises habitudes » a expliqué Mr Zakari Ibrahim au micro du studio kalangou.

Ce qui veut dire que ces enfants risquent d’être des sans avenir et rejetés par la société.

Zeinabou Abdou Saidou