Les nouvelles conditions d’utilisation de WhatsApp contestées
Source: Pixabay.com

Les nouvelles conditions d’utilisation de WhatsApp contestées

WhatsApp, ce logiciel de messagerie instantanée donne du fil à retordre ces derniers temps à ses utilisateurs (environ 2 milliards dans le monde). En effet depuis le mois de janvier, l’entreprise américaine WhatsApp attire la colère de certains de ses utilisateurs. Pour cause, la nouvelle mise à jour des conditions d’utilisation. La notification annonçait que les utilisateurs ont jusqu’au 8 février 2021 pour accepter les nouvelles conditions d’utilisation au risque de voir leur compte suspendu de la plateforme de la messagerie. Désormais, les utilisateurs de cette application devront partager leurs données personnelles avec le réseau social Facebook.

De quoi s’agit-il ?

Il y a quelques jours, les utilisateurs de WhatsApp ont vu s’afficher sur leur téléphone une nouvelle mise à jour demandant l’acceptation des conditions générales d’utilisation, faute de quoi le compte risquait de disparaitre. Des conditions qui touchent du doigt le partage des données personnelles des utilisateurs avec Facebook.

Il faut savoir que WhatsApp fait partie intégrante de Facebook depuis son rachat par la firme américaine en 2014, et ce rachat était intervenu lorsque Facebook a décelé une possible concurrence avec WhatsApp, qui montait en puissance.

Cette situation a entrainé une migration massive de ses utilisateurs vers des plateformes de messageries concurrentes. « Avec ce que prévoyait de faire WhatsApp, j’ai installé Signal et Telegram et s’ils ne changent pas d’idée ; je vais désactiver complètement mon WhatsApp » s’est exprimée une utilisatrice de cette messagerie au Studio Kalangou.

WhatsApp a séduit les internautes grâce à sa politique de confidentialité, selon un ancien utilisateur de WhatsApp « en fait j’avais basculé sur Signal parce qu’en réalité si nous nous sommes inscrits au début sur WhatsApp, c’est pour la confidentialité ».

Pour une autre, cela ne change rien « Avec les récentes mises à jour, il y a beaucoup de personnes qui ont migré vers ces (nouveaux) réseaux, mais moi, je reste sur WhatsApp. Je pense que ça revient au même ».

Que dit WhatsApp ?

« Grâce à de nombreuses personnes, nous comprenons la confusion qui règne autour de la récente mise à jour. Beaucoup d’informations erronées ont circulé, ce qui a créé de l’inquiétude. Nous souhaitons aider chacun à comprendre nos principes et les faits. » Pourrait-on lire dans le communiqué publié par WhatsApp en date du 15 janvier 2021 disponible ici. L’entreprise américaine explique que lesdites conditions n’entreront en vigueur que le 15 mai 2021 et non le 08 février prochain comme indiqué initialement.

Elle rassure ses utilisateurs que « Personne ne verra son compte suspendu ou supprimé le 8 février ». Pour WhatsApp, la mise à jour de sa politique « n’a aucune incidence sur la confidentialité » des messages et appels personnels des utilisateurs.

En réalité, le changement va s’opérer sur les fonctionnalités : les « fonctionnalités professionnelles optionnelles font partie de nos efforts constants visant à permettre à tous de communiquer avec des entreprises de manière plus sûre et plus facile ». Il s’agit là, des options qui permettent la découverte d’entreprises à travers des publicités telle que disponible sur Facebook et Instagram, permettant de faire des achats via WhatsApp…

La protection des données personnelles

Selon Julien Le Bot, journaliste, spécialiste des questions numériques et auteur du livre « Dans la tête de Marck Zuckerberg » les citoyens européens sont mieux protégés à travers le RGPD (règlement général sur la protection des données). « Les internautes européens sont beaucoup plus protégés que les internautes africains ou américains parce que la régulation, c’est-à-dire l’encadrement des activités de WhatsApp par le monde politique, par les gouvernements fait qu’en Europe, WhatsApp est moins libre d’exiger tant de données personnelles de la part de ses utilisateurs » a expliqué Julien Le Bot.

Les internautes africains sont plus exposés de voir leurs données partagés par WhatsApp puisque : « Malheureusement en Afrique, à ce stade rien n’est fait pour les protéger, rien n’est prévu pour encadrer sérieusement les activités des internautes » a poursuivi Julien.

Pour Cyprien Tankeu, ancien chargé de la gestion des communautés de développeurs Google en Afrique Francophone, « Lorsqu’on revient sur les lois en présence au Niger, s’il n’y a aucune loi qui dit que c’est illégal, ce sera légal du point de vue de Facebook. » Cyprien Tankeu ajoute que nombreux sont les Etats africains qui ne disposent pas de lois qui encadrent la protection des données personnelles.

Quels sont les enjeux ?

Pour Julien Le Bot « l’enjeu pour l’entreprise c’est d’abord de calmer le jeu et puis éventuellement de revoir la façon dont ils vont essayer de se positionner sur les enjeux pour faire accepter cette mise à jour ».

L’appartenance de WhatsApp à Facebook décrit cet enjeu car « on y est certes quelque part un peu plus tranquille que sur Facebook puis que les conversations qu’on échange avec ses contacts sont chiffrés de bout en bout » c’est-à-dire que « personne ne peut lire le contenu de votre conversation » a expliqué Julien.

WhatsApp sait « à qui appartient le téléphone, il sait où vous vous connectez, quel est l’adresse IP, il sait quel est le type d’appareil utilisé, si c’est un IPhone ou un Android ». Selon Julien Le Bot, ce sont là des informations exploitables d’un point de vue commercial « qui pourraient intéresser Facebook qui cherche quelque part à rentabiliser son investissement de 2014 ». Tel est l’enjeu actuellement.

Derrière cette mise à jour, selon Julien Le Bot « tous ceux qui, à l’heure actuelle, n’étaient pas monétisés par WhatsApp et qui correspondent à des données sur ses utilisateurs, et bien WhatsApp souhaite désormais les utiliser pour les consolider et les croiser avec les données qui sont possédées par Facebook ».

Le fait d’être uniquement sur WhatsApp et non sur Facebook ne permet pas d’échapper totalement au géant américain, en revanche dit Julien Le Bot « c’est vrai qu’on on est un peu moins monétisable. C’est un peu moins intéressant d’un point de vue publicitaire ». Par contre l’utilisateur des deux plateformes permet à Facebook « en tant qu’entreprise » de dire aux publicitaires « je suis en mesure de dire que telle personne, la façon dont elle utilise son compte WhatsApp, c’est comme ceci et la façon dont elle utilise son compte Facebook c’est comme cela ». Il explique que cela permet ainsi au monde publicitaire de cibler des catégories de personnes sur telle ou telle plateforme, ici Facebook et WhatsApp.

Confortant ainsi un model publicitaire, conclut Julien Le Bot.